Monday 6 January 2014

* Le supermarché eco-friendly avec main d'oeuvre essentiellement bénévole

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Quarante ans après sa création, la Food Coop de Park Slope (PSFC), à New York, va faire un petit à Paris. La Louve ne compte ouvrir dans le XVIIIe arrondissement qu’en 2015, mais il a déjà dépassé ses objectifs de levée de fonds sur Kiss Kiss Bank Bank, avec plus de 40 000 euros collectés. Les futurs bénévoles se pressent, espérant faire leurs courses pour 20% à 40% moins cher qu’ailleurs.



A la Coop [PDF] de Brooklyn, les 16 200 membres travaillent gratuitement 2h45 toutes les quatre semaines pour faire tourner la boutique – 75% de la main-d’œuvre est donc bénévole.

Rue89 a visité ce lieu sans pareil avec Joe Holtz, premier des 60 salariés et désormais directeur général. Son slogan ? « “La nourriture pour les gens, pas pour le profit” : on a fait ça pour nous, parce qu’on ne pouvait pas s’acheter à manger.  » Dans l’Amérique des années 2010, c’est encore pire, surtout si l’on veut manger bio.

Espace livraison : un « valet » pour remplir le coffre
A la Coop, il n’y a pas de parking, contrairement à la plupart des supermarchés américains, mais un valet peut vous raccompagner chez vous ou à votre voiture. C’est l’une des tâches proposées aux 500 bénévoles qui, chaque jour, font tourner le magasin.

Whole Foods, la grande chaîne de supermarchés bio, doit ouvrir prochainement dans ce quartier, avec un parking pour la clientèle. Mais la Food Coop ne craint pas la concurrence, puisqu’elle n’est pas dans l’économie de marché.

Au sous-sol, on découpe le fromage et on prépare les épices
Les bénévoles se répartissent en équipes et font leurs 2h45 ensemble toutes les quatre semaines à la même heure. Quand on en a rejoint une, normalement, on n’en change plus. A la cave, à côté du stock, un endroit est réservé au conditionnement des matières premières. Les coopérateurs découpent le fromage, pèsent et emballent condiments, tisanes et épices.

Ceux qui ont la tâche – plus pénible – de nettoyer le magasin bénéficient d’un temps de travail raccourci à deux heures.

A la caisse, Lucy trouve que le temps passe vite, les clients moins
Les caissières aussi sont des membres de la communauté. Lucy est affectée à ce poste, et même si elle n’a pas joué à la marchande quand elle était petite, elle trouve que le temps passe vite et que sa tâche lui permet de bien connaître l’ensemble de l’offre (plus de 8 000 produits). Les clients sont indulgents quand elle n’est pas assez rapide.

Mais quand elle repasse de l’autre côté de la caisse, elle trouve parfois pénible de devoir faire la queue. Elle s’organise pour venir en dehors des heures de trop grande affluence. Le week-end, la file d’attente peut aller jusqu’à une demi-heure.

C’est en clin d’œil à cette tradition-là que le journal de la Coop s’est appelé The Linekeeper’s Gazette (« le journal des gens qui font la queue »). «  Avant, c’était encore pire, nous avons étendu les horaires d’ouverture au fil des années. Maintenant, la Coop est ouverte 7 jours sur 7 (de 6 heures à 22 heures le samedi). Mais plus on a des horaires élargies et plus ça attire du monde  », explique Joe Holtz, «  pas très fier  » de devoir limiter le nombre de nouvelles adhésions.

Devant les casiers, des contrôles pour filtrer les nounous
Pas de vigile ici, mais un(e) bénévole qui vérifie les cartes à l’entrée et les tickets de caisse à la sortie. Chacun peut déposer son manteau et son sac en toile (offert par la Coop lors de l’adhésion) dans un casier à l’entrée, histoire de se sentir vraiment comme à la maison.

Mais attention, la sécurité a dû être renforcée après que «  l’affaire des nounous  » a porté un sale coup à la réputation de l’établissement. Dans ce quartier intello qui n’en finit pas de s’embourgeoiser, certains adhérents à l’emploi du temps trop chargé avaient choisi d’envoyer leur employé de maison bosser bénévolement à leur place – «  Le temps, c’est ce qu’on a de plus précieux  », philosophe Joe Holtz. Désormais, le contrôle à l’entrée se fait sur photo. 

Dans les rayons : wasabi, fougère, daïkon, champignons... débordent
Le problème de la Coop, c’est le manque de place. Produits et affichettes débordent de partout. Si vous voulez une nouvelle marque de yaourts, vous le mettez dans le livre des suggestions.
Les acheteurs décident ensuite, en concertation avec la communauté, s’ils le mettent en rayon. Puis, comme partout ailleurs, si les nouveaux produits ne se vendent pas, ils sont retirés.

Ici, on trouve des pousses de wasabi et de fougère, du daïkon, treize sortes de champignons… et même, depuis 1991, de la viande (de l’agneau venu d’Australie, mais du bœuf uniquement nourri à l’herbe).

La bière a fait son introduction plus récemment (elle n’est pas vendue fraîche afin d’éviter qu’elle ne soit consommée tout de suite). Les produits sont majoritairement bio (sauf si la différence de prix est trop importante), et provenant de fermes locales (enfin, situées à moins de 800 kilomètres).

A la crèche, des nounous surbookées
Un service de baby-sitting gratuit permet de déposer ses enfants pour faire les courses ou prendre son tour de travail. Les nourrices sont évidemment des membres de la communauté.

Le nombre d’enfants est limité à douze s’il y a trois bénévoles pour s’en occuper, et à dix s’ils ne sont que deux : «  Il est recommandé de s’organiser autrement si vous voulez être sûr d’avoir une place  », souligne le règlement.

Dans les bureaux, on prépare la retraite
Parmi les 60 salariés de la Coop, 19 sont affectés à la coordination des bénévoles. La coopérative ajoute 21% sur le prix de gros et réalise depuis peu des bénéfices, qui sont réinvestis dans la baisse des prix.

Il faut aussi organiser le don des invendus à des associations caritatives, le recyclage de toutes les matières d’emballage, le compostage, la filière de recyclage des déchets électriques...

Et mettre en place des règles particulières pour certains membres. Ainsi, vous ne pouvez prendre votre retraite de la Coop et continuer à y consommer que si vous avez 65 ans et au moins vingt ans d’ancienneté. Les seuls autres motifs pour être exempté sont le handicap ou le congé maternité. Vous pouvez être radié si vous ne respectez pas les règles – une amnistie est quand même possible après une période de probation.

Au quotidien, la coopérative fonctionne comme une vraie communauté à l’américaine, avec ses événements organisés dans une grande salle, comme des cours de cuisine ou des fêtes d’anniversaire.

A la rédaction, on prépare le journal de la communauté
Une partie des bénévoles sont affectés à la réalisation du Linewaiter’s Gazette, le journal de la communauté. On peut lire dans un numéro récent un article titré : «  Galettes de riz et chips d’algue  : les conséquences de Fukushima sur la nourriture  ».

Un autre revient sur un documentaire consacré à la gentrification de Brooklyn et réalisé par une des membres de la Coop.

Dans les colonnes se trouvent aussi une foultitude d’annonces pour les soirées de la communauté  : soirée jeux pour tous les âges, soirée « savoir quand prendre sa retraite », cours de BodyTalk (science du toucher) ou pour apprendre la photo avec son iPhone… De quoi occuper toute sa semaine avec les coopérateurs.

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