Thursday 26 August 2010

Daden Venkatasawmy décongestionne les esprits pour le métro


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Interview de Daden Venkatasawmy, consultant en investissement

«La rentabilité financière du métro : une fausse question»

On ressort le dossier du métro léger. Pourquoi une telle inaction depuis 20 ans ?
Il faut se dire que ces citoyens lambda réfléchissent au problème et sont finalement des experts puisqu’ils vivent le calvaire au quotidien. Et de cette consultation pourraient ressortir des idées intéressantes. Seulement, on préfère écouter les lobbies.

Le lobby des autobus évoque le risque de pertes d’emplois…
C’est une chance pour les compagnies de bus de réfléchir à un nouveau service, à un nouveau modèle économique, plus efficace, plus en phase avec la demande et la réalité physique des lieux desservis.Des lignes de minibus sur des circuits plus courts, avec une meilleure desserte des quartiers, plus fréquente, pourraient s’ajouter à un mode alternatif de transport.
La perte d’emploi est un faux problème. Peut-être parce que cela ne sert pas les intérêts immédiats, on privilégie le statu quo.

Le «Bus Lane» est justement une aubaine pour les compagnies d’autobus. Leur intérêt est qu’on continue dans ce sens…
Le Bus Lane n’a jamais été préconisé par les experts. On apporte une réponse routière à un problème routier. L’accès à Port-Louis peut être comparé à une bouteille. L’entrée de Port- Louis est le goulot et les voies d’accès la bouteille. En ajoutant des Bus Lanes, on ne fait qu’élargir le haut de l’entonnoir, ce qui ne fait qu’encombrer davantage le goulot d’étranglement existant.

L’asphyxie concerne surtout la conurbation Curepipe- Port-Louis. Ne faut-il pas voir plus loin ?
En effet, il faut aller de Mahébourg à Grand-Baie en 15- 18 stations avec une voie mixte pour le transport des passagers et des marchandises. Le port et l’aéroport sont alors directement connectés à de nouvelles zones industrielles, commerciales, résidentielles et logistiques.

Les détracteurs du métro léger mettent en avant le coût du projet, qui en plus ne cesse d’augmenter…
On tergiverse sur le point de rentabilité financière. Dans le monde, seul le système ferroviaire rapide de Hong Kong est rentable. L’Etat ne peut pas perdre de temps sur la question de rentabilité financière car l’investissement est nécessaire. C’est la même chose pour l’investissement consenti pour un hôpital ou une école. Est-ce rentable ? La question ne se pose pas. Cela dit, il y a une rentabilité économique évidente : une population en bonne santé, éduquée et disposant d’un réseau de transport performant est un atout pour l’économie. Le métro léger fait grincer des dents parce qu’on n’explique pas le projet dans sa globalité.

Cela demande des investissements et des changements physiques. Voyez-vous des solutions sans travaux à court terme ?
La centralisation des services administratifs et économiques doit être revue. Décentraliser et déconcentrer en déléguant une partie des prérogatives aux collectivités permettrait de réduire l’emprise de Port-Louis. L’aménagement du territoire doit être repensé en parallèle à la redéfinition de la fonction des villes d’autant qu’on crée de nouvelles municipalités. L’accessibilité des services à l’échelle locale réduirait une part du trafic vers la capitale.

Il faut aussi favoriser une déconcentration humaine de la conurbation. D’ailleurs, le projet de décentralisation physique vers Highlands est discutable car il ne fait rien pour sortir du couloir saturé Curepipe-Port-Louis ! On compte 650,000 personnes dans cette conurbation. La pression est énorme sur le réseau routier existant. On constate néanmoins une désurbanisation bien que cela implique le besoin d’une voiture, sauf si en parallèle on étoffe l’offre de transport hors du couloir Curepipe- Port-Louis.

Est-ce suffisant pour réduire le trafic ?
Il faudrait prendre d’autres mesures dans la foulée. La régionalisation des collèges permettrait aussi de réduire le trafic.

En outre, les secteurs public et parapuplic pourraient convertir le duty free package pour l’achat d’une voiture afin que l’employé bénéficiaire ne soit pas contraint d’acheter un nouveau véhicule.
Cette mesure de conversion d’une prime en cash permettrait d’éviter que le parc automobile croisse systématiquement. Il faut aussi que le covoiturage se développe.

Quoi qu’il en soit, on ne pourra faire l’économie de grands travaux. La mise en place du péage convertira- t-elle des automobilistes aux transports en commun ?
Comment peut-on justifier le paiement d’un péage sur les nouvelles routes en construction alors qu’aucune alternative viable n’est proposée ?

La route Terre-Rouge- Verdun offrira bientôt une alternative à l’obligation de passer par Port-Louis dans un trajet Nord- Sud et inversement. Mais je ne suis pas d’accord de faire payer l’infrastructure publique. C’est à l’Etat de régler cela. Par ailleurs, on ne peut pas faire payer une amende aux voitures ayant un seul passager s’il n’y a pas d’alternative raisonnable ça marche si le transport en commun apporte des alternatives. 

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